Quel est le rapport entre l'économie et l'environnement ?

Quel est le rapport entre léconomie et lenvironnement ?
La protection de l’environnement est essentielle, comme en témoignent la hausse des températures, la fonte des glaciers, la disparition d’espèces animales, etc. Pour les économistes, cette question a véritablement pris forme au milieu du 20ème siècle. Différents instruments économiques ont été progressivement proposés aux décideurs publics, certains étant intégrés aux politiques publiques. Désormais, avec les avancées dans les autres disciplines, et en particulier en psychologie, les économistes se tournent de plus en plus vers des incitations non-monétaires. Mais la question de leur efficacité se pose…

Il est possible d’identifier quatre raisons à la mise en place d’une politique environnementale : le coût de la pollution due à l’activité humaine ; la protection de l’environnement appréhendée comme un jeu de bien public où chacun a intérêt à laisser les autres agir et à ne pas contribuer ; au-delà de l’amélioration de la qualité environnementale, les mesures politiques, notamment au travers des taxes, sont une source de revenu pour l’Etat ; la solidarité inter-générationnelle : inciter les générations présentes pour que les générations futures en bénéficient.

Du point de vue des politiques environnementales, une incitation consiste en la mise en place d’une mesure politique ayant pour objectif de modifier le comportement des individus. Cette action s’avère nécessaire car la plupart des agents économiques ne prennent pas en compte l’impact de leur activité sur l’environnement, ou externalité. Une externalité se définit comme un effet sans prix de l’activité d’un agent sur d’autres. Ainsi, l’objectif principal d’une politique environnementale incitative va être la correction d’une externalité par la modification du comportement. A cette fin, les gouvernements ont à leur disposition des outils incitatifs monétaires (taxes, subventions, permis) et non monétaires (nudges (actions simples, non contraignantes et peu coûteuses), motivation, éducation).

  • Stenger A., Ouvrard B., 2018, Politiques environnementales et incitations. De la théorie à l’innovation empirique, Londres : ISTE Editions.

Les incitations monétaires

Il faut attendre les années 1920 où l’économiste britannique Arthur Cecil Pigou est le premier à proposer une internalisation des externalités, connue aujourd’hui sous le nom de taxe pigouvienne ou écotaxe. Par le biais de taxes ou de subventions, l’État doit intervenir pour compenser l’écart entre le coût privé et le coût pour la société (coût collectif). Les mesures gouvernementales basées sur la taxe pigouvienne sont nombreuses : taxe sur l’éco-participation, taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers (TIPP), système de bonus/malus lié à l’achat d’un véhicule neuf (combinaison taxe/subvention).

Quel est le rapport entre léconomie et lenvironnement ?

La mise en place d’une telle taxe nécessite une information parfaite sur les coûts et bénéfices externes, au risque pour les autorités publiques d’un déséquilibre du budget : cela a été le cas avec la politique de bonus/malus mise en place en France en 2008 et dont les barèmes ont été révisés en 2018 suite à une mauvaise anticipation de la réaction des consommateurs, qui ont profité de l’offre en nombre très supérieur à celui prévu, ce qui a entrainé une augmentation du coût supporté par l’Etat.

Cette tradition pigouvienne d’incitation par les prix (principe du pollueur-payeur) a dominé l’économie publique jusque dans les années 1960 où elle a été remise en cause par un autre économiste britannique, Ronald Coase (1960), au profit d’une incitation par les quantités reposant sur la distribution de droits de propriété sur l’externalité. Coase considère que les agents, en échangeant ces droits, parviendront à une allocation optimale égalisant le coût marginal de l’un au bénéfice marginal de l’autre. Les deux applications les plus connues de l’argument de Coase sont le marché de permis d’émissions de SO2 (dioxyde de soufre) aux États-Unis mis en place en 1990 et le marché des émissions de gaz à effet de serre de l’Union européenne à partir de 2005.

Quel est le rapport entre léconomie et lenvironnement ?

CC Patrick Mignard pour Mondes Sociaux

L’objectif des régulations à la Pigou ou à la Coase est d’inciter les individus à adopter des comportements pro-environnementaux. Or, le prix des énergies fossiles n’est pas suffisamment élevé pour entrainer une transition énergétique, autrement dit les incitations ne sont pas assez fortes. Avec l’émergence de mouvements environnementalistes et la montée des problèmes environnementaux, la question des incitations a pris une ampleur considérable. Ainsi, va émerger un troisième type de régulation, efficace et réaliste, basé sur des solutions de second rang : l’objectif va être la minimisation du coût collectif de dépollution pour un niveau d’externalité exogène donné. Ce type de réglementation a été mis en place dans l’Union Européenne depuis 1990 avec les normes d’émission des polluants autres que le CO2 pour les voitures.

L’efficacité et l’équité des trois types d’incitations précédents varient selon les contextes et nécessitent parfois l’adoption d’une incitation « hybride », comme la mise en place d’un marché de permis d’émissions de CO2 combiné avec un prix plancher. Toutefois, la réaction des consommateurs suite à l’adoption de mesures incitatives est mal renseignée, leur étude se limitant à la prise en considération d’individus rationnels poursuivant leur intérêt personnel et ne permettant pas d’expliquer l’efficacité ou l’échec de certaines mesures : ainsi, l’écotaxe sur les équipements électroniques fonctionne bien alors que celle sur les poids lourds a connu un rejet massif. De nouvelles formes d’incitation et de régulation environnementales tiennent compte de biais comportementaux et de facteurs psychologiques.

  • Coase R. H., 1960. “The problem of social cost”, Journal of Law and Economics, n°3, 1-44.
  • Pigou A., 1920. The economics of welfare, London : MacMillan.

Les incitations non monétaires

Quel est le rapport entre léconomie et lenvironnement ?

CC Pixabay OpenClipart-Vectors

Depuis les années 2000, une nouvelle forme de régulation est apparue par le biais des nudges (Thaler, Sunstein, 2008). « Un nudge est une action simple, peu ou pas coûteuse (tant dans sa mise en place que pour l’éviter), et non contraignante, dont le but est d’orienter les individus afin qu’ils prennent des décisions améliorant leur bien-être ou, plus généralement, celui de la société dans son ensemble. Cette action peut relever de l’utilisation des biais psychologiques (présentation particulière des différentes options, option par défaut, etc.) ou peut revêtir la forme d’une information donnée aux individus pour déclencher une prise de conscience ».

Malgré les reproches adressés notamment en termes d’éthique face à leur aspect manipulateur et paternaliste, leur simplicité de mise en œuvre et leur faible coût, font des nudges un instrument privilégié dans le cadre de la régulation environnementale. Ainsi bon nombre de mesures du quotidien font appel à eux, comme la dématérialisation des documents administratifs ou le changement de packaging de lessives. Cependant, la réaction des agents face à leur mise en place est difficile à prévoir avec certitude, celle-ci dépendant essentiellement des facteurs psychologiques comme la motivation ou l’existence de normes sociales.

Un aspect essentiel dans l’analyse des choix des individus est la motivation. Les théories de la motivation permettent notamment d’expliquer – au moins en partie – les limites rencontrées par les incitations classiques. En effet, nombreux sont les comportements où les motivations psychosociales (générosité, conformisme, morale…) prennent le pas sur la motivation purement monétaire, biaisant les calculs coût/avantage, classiques en économie. Cela provient de l’aspect dual de la motivation (Deci, 1975) : d’une part, il existe une motivation extrinsèque liée aux pénalités monétaires qui font partie du contexte dans lequel l’individu prend ses décisions ; d’autre part, il existe une motivation intrinsèque propre à chaque individu.

La dominance de l’une ou l’autre de ces motivations conditionne l’efficacité des politiques pro-environnementale. Ces dernières doivent au préalable identifier l’existence d’une motivation interne afin de déterminer les mesures les plus efficaces pour influencer le comportement des individus. C’est, par exemple, le cas pour la prévention des déchets où par le biais des mécanismes informationnels et financiers, l’individu adopte un comportement allant dans le sens de l’intérêt collectif tout en satisfaisant son intérêt personnel.

  • Thaler, R. H., Sunstein C. R., 2003, « Libertarian Paternalism », American Economic Review 93 (2), 175-79.
  • Deci E. L., 1975, Intrinsic Motivation, New York : Plenum Press.

Les incitations sont-elles efficaces ?

Quel est le rapport entre léconomie et lenvironnement ?

CC Pixabay bandvela

Malgré l’existence d’outils incitatifs, l’adoption d’un comportement pro-environnemental n’est pas automatique. Dès lors, selon l’UNESCO (2014), l’éducation apparaît comme une piste d’action efficace pour changer les comportements. Elle joue un rôle d’incitation à travers l’acquisition de connaissances dont l’objectif est d’augmenter le nombre global d’individus adoptant un comportement pro-environnemental ainsi que le nombre d’actions « vertes » par individu.

L’éducation est aussi une sorte de catalyseur intergénérationnel de comportement pro-environnemental. En s’appuyant sur les notions théoriques d’engagement et de représentations sociales, les programmes d’Education Relative à l’Environnement et au Développement Durable se sont développés au sein du système éducatif. Si ces mesures jouent directement sur les comportements en modifiant les croyances, puis les attitudes, l’éducation a plus un rôle informatif sur les motivations. Bien que les moyens alloués à ces programmes soient insuffisants et si pour l’instant, l’éducation demeure cantonnée à un rôle informatif, il existe un impact positif direct à court terme sur les comportements des élèves et à long terme sur les citoyens qu’ils deviendront… et un impact indirect positif sur les comportements des parents (MGEN, 2015).

Enfin, il faut tenir compte de l’institution à l’origine de la mesure incitative ainsi que des relations entre incitation, motivation et institution. En effet, les individus ciblés sont sensibles à la nature et à la proximité de l’institution mettant en place la mesure. Pour que celle-ci soit efficace, il faut d’une part, qu’elle obtienne l’adhésion des agents concernés et que les résultats attendus ne différent pas significativement de ceux obtenus ; et d’autre part, que l’institution qui la met en œuvre soit crédible et obtienne la confiance des agents.

  • MGEN, 2015. L’éducation à l’environnement et au changement climatique, regards croisés des enseignants et des parents, Rapport, Paris.
  • UNESCO, 2014. Feuille de route pour la mise en œuvre du programme d’action global pour l’éducation en vue du développement durable, Paris.

  • Mondes sociaux a aussi publié :
    • Nadel S., “L’innovation au secours de l’environnement ?“, Mondes Sociaux, avril 2017
    • Plumecoq G., “Rendre l’économie écologique et le développement soutenable“, Mondes Sociaux, octobre 2017
    • Milanesi J., “Externalités et anguilles grillées“, Mondes Sociaux, mars 2017

Crédits image à la Une : CC Pixabay Alexas_Fotos et crédits image d’entrée : CC Pixabay OpenClipart-Vectors

Quel est le rapport entre léconomie et lenvironnement ?


Quel est le lien entre l'environnement et l'économie ?

Les liens entre croissance économique et qualité de l'environnement se concentrent en fait sur cinq éléments: (i) le degré de substituabilité entre actifs naturels et actifs artificiels, (ii) la prise en compte du changement dans les technologies et le capital humain, (iii) le commerce international des ressources ...

Quel est l'importance de l'économie de l'environnement ?

L'économie de l'environnement permet de sauver des vies, d'épargner de l'argent et de protéger les écosystèmes. Pour les pays en développement, l'économie de l'environnement est un outil sans égal pour favoriser le développement durable et éviter bon nombre des erreurs commises par les pays industrialisés.

Qu'est

L'environnement économique fait référence à tous les facteurs économiques externes qui influencent les habitudes d'achat des consommateurs et des entreprises et qui ont donc une incidence sur le rendement d'une entreprise.